DATE DE MUTATION D'UN LOT DE COPROPRIÉTÉ : LA PRIMAUTÉ DE L'ACTE AUTHENTIQUE SUR LA NOTIFICATION
Lors de la vente d'un lot de copropriété, la question de la date de mutation est cruciale pour déterminer la répartition des charges entre le vendeur et l'acquéreur. Si l'acte authentique de vente matérialise le transfert de propriété, la date à retenir par le syndic et reconnue par la jurisprudence soulève parfois des nuances. L'analyse juridique et la pratique mettent en lumière la prédominance de la date de signature de l'acte, bien que la date de notification de la mutation au syndic conserve une importance administrative et financière.Les règles de répartition des charges : l'article 6-2 du décret de 1967
Le cadre légal en la matière est principalement défini par l'article 6-2 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967. Cet article organise la répartition des charges de copropriété à l'occasion d'une mutation à titre onéreux d'un lot :
- Le paiement de la provision exigible du budget prévisionnel incombe au vendeur. 
- Le paiement des provisions des dépenses non comprises dans le budget prévisionnel (travaux) incombe à celui, vendeur ou acquéreur, qui est copropriétaire au moment de l'exigibilité (appel de fonds). 
- Le trop ou moins perçu sur provisions, révélé par l'approbation des comptes, est porté au crédit ou au débit du compte de celui qui est copropriétaire lors de l'approbation des comptes. 
Cependant, ces règles de répartition entre le syndicat et les copropriétaires peuvent être aménagées par convention entre le vendeur et l'acquéreur (l'article 6-3 du même décret précise que « Toute convention contraire aux dispositions de l'article 6-2 n'a d'effet qu'entre les parties à la mutation à titre onéreux »).
Date de mutation : Acte authentique versus Notification
La date réelle de mutation (Acte authentique)
En cas de litige, la jurisprudence retient généralement la date de signature de l'acte authentique de vente chez le notaire comme la date effective de mutation. C'est à partir de cette date que la propriété est transférée et que le nouveau copropriétaire est censé supporter les charges afférentes au lot, sous réserve des règles de l'article 6-2 et de l'accord des parties. Pour le juge, cet acte notarié est l'élément factuel faisant foi du changement de propriétaire.
Ce principe est renforcé lorsque le syndic a été sollicité pour établir l'état daté (document obligatoire demandé par le notaire pour l'acte de vente, art. 5 du décret de 1967). En fournissant l'état daté, le syndic est en principe informé du processus de vente et peut raisonnablement présumer que la signature aura lieu, lui permettant ainsi d'anticiper le changement de copropriétaire.
Le rôle de la notification
La notification de mutation est un avis formel adressé au syndic (prévu par l'article 20 de la loi du 10 juillet 1965) par le notaire après la vente.
- Opposabilité des sommes dues : Le principal intérêt de cette notification est de déclencher un délai d'opposition de 15 jours pour le syndic sur le prix de vente. Le syndic peut alors former opposition pour le paiement des sommes qui lui sont dues par l'ancien copropriétaire (charges impayées). 
- Point de départ administratif pour le syndic : Si le notaire n'a pas sollicité d'état daté et que le syndic n'a donc aucun moyen d'être informé de la vente, le syndic est contraint d'attendre la date de réception de la notification pour enregistrer la mutation dans ses comptes et adresser le courrier et les appels de fonds au nouvel acquéreur. Dans ce cas, sans information préalable, le syndic peut légitimement continuer à imputer les charges à l'ancien copropriétaire jusqu'à la date de réception de l'avis de mutation. 
Recours de l'ancien copropriétaire
Si, en l'absence de notification rapide ou en cas de manquement du notaire, le syndic impute injustement des charges au vendeur pour une période postérieure à la vente, l'ancien copropriétaire dispose d'un recours. Il peut se retourner contre le notaire (qui a manqué à son devoir de notifier la mutation) pour récupérer les sommes indûment payées au syndicat, puisque l'acte de vente atteste de la date réelle de la mutation et que, en cas de litige, c'est cette dernière que le juge retiendra pour départager le solde du compte.
En conclusion, si la date de signature de l'acte authentique est la seule qui vaille pour le juge et la réalité du transfert de propriété, la date de notification est essentielle pour l'organisation administrative et comptable du syndic et la protection des créances de la copropriété.
SOURCE: ART. 5 DU DECRET DU 17 MARS 1967; ART. 6 DU DECRET DU 17 MARS 1967 ; ART. 6-2 DU DECRET DU 17 MARS 1967

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