CULTURE GÉNÉRALE : LES MODÈLES DE GESTION DES COPROPRIÉTÉS DANS LE MONDE

CULTURE GÉNÉRALE : LES MODÈLES DE GESTION DES COPROPRIÉTÉS DANS LE MONDE

I. Cadre légal et définition de la copropriété : Le benchmark français

Le droit français de la copropriété, structuré principalement autour de la loi du 10 juillet 1965, sert de référence normative pour cette analyse comparative. Ce cadre se caractérise par une forte intervention législative dans la structuration des organes de gestion, des procédures de prise de décision, et de la transparence financière. La loi de 1965 définit la copropriété comme l'organisation d'un immeuble bâti ou d'un groupe d'immeubles dont la propriété est répartie entre plusieurs personnes, par lots comprenant chacun une partie privative et une quote-part de parties communes.

Les Fondements de la Propriété Collective en Droit Français

Le principe fondamental en France est l'existence du syndicat des copropriétaires, doté de la personnalité morale, dont l'objet est la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Les copropriétaires, membres de ce syndicat, exercent leurs droits de vote lors de l'Assemblée Générale (AG) en proportion de leur quote-part des parties communes ou spéciales (tantièmes). Cette pondération est essentielle, car elle garantit que le poids décisionnel est proportionnel à la valeur de la propriété détenue.   

La législation française fournit un cadre rigide et détaillé, notamment en matière de décision (majorités) et de finance (comptabilité), qui permet de mesurer la souplesse ou l'exigence des régimes étrangers. L'évolution de cette législation, notamment par les lois ALUR et ELAN, a renforcé la professionnalisation de l'organe exécutif et la transparence comptable.

Terminologie comparative : Vers un lexique global

Il est indispensable de noter les équivalences terminologiques utilisées dans les systèmes comparés :

  • France/Belgique : Copropriété / Association des copropriétaires (APC) ou Syndicat de copropriétaires (SDC).

  • Italie/Espagne : Condominio / Comunidad de Propietarios (régie par la Ley de Propiedad Horizontal, LPH).

  • Allemagne : Wohnungseigentum (WEG) / Wohnungseigentümergemeinschaft.

  • États-Unis : Condominium / Homeowners Association (HOA).

  • Japon : Kanri Kumiai (Association des propriétaires).

Cette diversité souligne que, si le concept de propriété collective est universel, les modalités de sa gouvernance varient profondément selon la tradition juridique (droit civil codifié vs. droit commun).

II. Les organes de gouvernance et d'administration

La comparaison des organes exécutifs et des collectivités de propriétaires révèle des divergences significatives, notamment concernant le statut juridique du gestionnaire et la durée de son mandat.

A. L'organe exécutif : Le Syndic, l'Administrateur et le Property Manager

1. Rôle et statut du gestionnaire en Europe continentale

En France, l'organe exécutif est le Syndic, qu'il soit professionnel ou bénévole/coopératif. Il est le mandataire légal du Syndicat des Copropriétaires, chargé d'exécuter les décisions de l'Assemblée Générale et d'assurer la gestion courante. Son rôle est strictement encadré par la loi, conditionné par des exigences de qualification professionnelle.

Chez les voisins européens, la désignation d'un administrateur est généralement obligatoire, à l'exception notable de l'Italie, où l'Administratore n'est requis que dans les copropriétés comptant plus de quatre copropriétaires. Les décisions prises par cet administrateur dans le cadre de ses pouvoirs engagent les copropriétaires.

Une distinction majeure apparaît dans la durée du mandat :

  • En Espagne et en Italie, le mandat est limité à 1 an. Cette brièveté du mandat est souvent interprétée comme un mécanisme de contrôle ex-post puissant, permettant aux copropriétaires de révoquer rapidement un gestionnaire insatisfaisant.

  • En Allemagne (Verwalter) et en Belgique (Syndic), la durée maximale du mandat est plus longue, pouvant atteindre 5 ans.

  • En France, la durée du mandat est d'au maximum 3 ans.

2. Modèles anglosaxons et asiatiques (HOA, Chine, Japon)

Aux États-Unis, la gestion quotidienne est souvent assurée par un Community Association Manager qui exécute les décisions du Board of Directors (Conseil d'administration). Ce Conseil, élu par les propriétaires, détient une obligation fiduciaire et jouit d'une autorité substantielle pour prendre des décisions dans les limites des lois de l'État et des documents de gouvernance (statuts).

En Chine, la gestion est souvent confiée à une Property Service Enterprise , suite à la réforme du logement urbain. Au Japon, bien que l'organe central soit l'Association des propriétaires (Kanri Kumiai), la gestion déléguée est courante.

B. La collectivité des copropriétaires : statut et surveillance

Le Syndicat des Copropriétaires (France) ou l'Association des Copropriétaires  (Belgique)  est une personne morale forte.

L'existence d'organes de contrôle est une caractéristique commune. En France et en Belgique, le Conseil Syndical ou le Conseil de Copropriété  exerce un rôle de surveillance et d'assistance auprès du Syndic. 

En Asie, le statut de l'organe de contrôle peut être moins clair. En Chine, le statut juridique précis de l'Owners' Committee (Comité des propriétaires) demeure ambigu dans la législation. Cette incertitude peut affaiblir sa capacité à ester en justice ou à exercer pleinement sa fonction de contrôle sur les entreprises de service immobilier mandatées. Le développement d'une gestion efficace des copropriétés nécessite non seulement un exécutif compétent, mais aussi un organisme de contrôle (le principal) dont le statut juridique est sans équivoque. 

III. Le processus décisionnel : L'assemblée générale et les seuils de majorité

La gestion collective de la copropriété est principalement régie par le vote en Assemblée Générale (AG). Le système français se distingue par la complexité et la graduation de ses majorités, conçues pour équilibrer l'efficacité de la gestion et la protection des droits minoritaires ou des fondamentaux de la propriété.

A. Le principe de la pondération et de la complexité française

En France, le vote est pondéré par les tantièmes. Ce principe est partagé par l'Italie où les millesimi sont fondamentaux pour les majorités et la répartition des charges , et par l'Allemagne où le Wertprinzip (basé sur les parts de copropriété) est le standard, bien que les statuts puissent prévoir le Kopfstimmprinzip (une voix par tête) ou l'Objektprinzip (une voix par lot).

Le système français établit une hiérarchie des décisions, allant de la gestion courante aux actes fondamentaux :

  1. Majorité Simple (Article 24) : Concerne la gestion courante et les travaux d'entretien. Elle requiert la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés uniquement. 

  2. Majorité Absolue (Article 25) : Nécessite la majorité des voix (tantièmes) de tous les copropriétaires (présents, représentés et absents). Elle est utilisée pour l'approbation du budget, le choix et la révocation du syndic. Un mécanisme de passerelle (Art. 25-1) permet d'éviter le blocage : si la résolution n'est pas adoptée mais obtient au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, l'AG peut immédiatement procéder à un second vote à la majorité simple (Art. 24). Ce dispositif démontre une intervention législative visant à favoriser l'efficacité décisionnelle tout en assurant une participation minimale.

  3. Double Majorité (Article 26) : Réclame la majorité de tous les copropriétaires ET les deux tiers (2/3) des voix. Elle est réservée aux décisions substantielles, telles que la modification du règlement de copropriété concernant la jouissance ou l'administration des parties communes, ou la suppression d'un poste de concierge. Un mécanisme de rattrapage permet un second vote à la majorité absolue si au moins la moitié des membres présents/représentés, représentant au moins un tiers des voix totales, l'approuve. 

  4. Unanimité : Exigée pour les actes les plus graves, tels que l'aliénation de parties communes nécessaires à la destination de l'immeuble ou la modification de la répartition des charges. 

B. Les majorités dans les systèmes voisins

Les systèmes voisins adoptent des approches différentes quant à la complexité des seuils :

  • Allemagne : L'approche est similaire, distinguant la majorité simple, la majorité qualifiée, la double majorité qualifiée et l'Allstimmigkeit (Unanimité de tous les propriétaires). Toutefois, la législation WEG allemande affirme qu'aucune décision ne requiert spécifiquement l'accord unanime des seuls propriétaires présents ou représentés à l'assemblée.

  • Espagne (LPH) : La loi met l'accent sur la facilitation de certains travaux d'intérêt social. Par exemple, l'exécution d'œuvres pour supprimer les barrières architecturales (installation d'ascenseurs, rampes) ne nécessite que la majorité simple des propriétaires et des quotes-parts, et ce, même si l'acte implique la modification du titre constitutif ou des statuts. Cette disposition législative place l'impératif d'accessibilité sociale au-dessus de la protection statutaire rigide. Pour d'autres travaux, comme l'installation d'infrastructures d'énergies renouvelables, une majorité du tiers des propriétaires et du tiers des quotes-parts est requise.

C. Modèles du monde (USA, Asie)

Aux États-Unis (HOA), le système est plus simple et repose sur la Majorité (plus de 50% des votes exprimés) pour les décisions courantes. Les décisions majeures, telles que l'amendement des documents constitutifs, requièrent une Supermajority (par exemple, 2/3 ou 3/4 des votes). Le risque associé à ces supermajorités est le gridlock (blocage). 

L'architecture des majorités françaises, avec ses mécanismes de passerelle (Art. 25-1 et second vote Art. 26), est une tentative de synthèse entre la nécessité de prendre des décisions (efficacité) et la protection des droits de la minorité, contrastant avec les modèles américains qui délèguent cette tension principalement aux statuts internes de l'HOA.

Tableau 1 : Synthèse comparative des organes de gouvernance et des majorités de Vote

Critère

France (Loi 1965)

Italie (Condominio)

Allemagne (WEG)

USA (HOA)

Chine (PME)

Organe Exécutif

Syndic Professionnel/Bénévole

Amministratore (Obligatoire > 4 cop.)

Verwalter

Board of Directors (Conseil élu)

Property Service Enterprise

Collectivité

Syndicat des Copropriétaires

Condomini

Wohnungseigentümergemeinschaft

Homeowners Association (HOA)

Owners' Committee (Statut parfois ambigu)

Pondération du Vote

Tantièmes (Quote-part)

Millesimi

Wertprinzip (Valeur) par défaut

Quote-part ou un lot/une voix

Quote-part (selon statuts)

Majorité Courante (Gestion)

Majorité simple (Présents/Représentés)

Nombre de copropriétaires et Millesimi

Majorité simple (50% des Stimmrechte participants)

Majority (>50% des votes exprimés)

Majorité simple

Majorité Qualifiée (Actes Majeurs)

Majorité absolue (Tous) ; Double Majorité (membres + 2/3 voix)

Quorum qualifié et seuil variable

Qualifizierte Mehrheit

Supermajority (2/3, 3/4)

Majorité qualifiée

Unanimité (Fondamentaux)

Oui (Vente parties communes, répartition charges)

Oui (actes fondamentaux)

Allstimmigkeit (Tous les propriétaires)

Rarement requise par la loi d'État

Oui


IV. Le cadre de la transparence financière et comptable

L'administration financière des fonds collectifs est un point de friction majeur dans la gestion de copropriété. Le législateur français a répondu à ce défi par l'imposition de normes comptables spécifiques visant la transparence.

A. La Rigueur de la comptabilité d'engagement en France

Le droit français impose au Syndic l'obligation de tenir une comptabilité d'engagement (Accrual Basis) en partie double.

La technique de la comptabilité en partie double consiste à inscrire simultanément un mouvement financier dans les deux comptes affectés par l'opération (débit/crédit), assurant en permanence l'égalité des sommes dans la balance générale. Cette méthode s'oppose à l'enregistrement simple en recettes/dépenses (Cash Basis). La comptabilité d'engagement, quant à elle, reconnaît les revenus lorsqu'ils sont acquis et les dépenses lorsqu'elles sont engagées (même si le paiement n'a pas encore eu lieu), offrant ainsi une image plus fidèle de la santé financière et des engagements futurs.

Cette obligation, édictée pour les syndics de copropriété, va de pair avec le vote obligatoire d'un budget prévisionnel et l'appel de provisions d'avance. Le but est d'améliorer la transparence des comptes et de comparer le "réalisé" au "prévisionnel". Le syndic doit en outre respecter scrupuleusement la nomenclature des comptes imposée par arrêté.

Une dérogation existe cependant pour les petites copropriétés (moins de dix lots, budget moyen inférieur à 15 000 €), qui peuvent constater leurs engagements uniquement en fin d'exercice. 

Le choix du législateur français d'imposer cette méthode comptable précise (partie double/engagement) traduit une méfiance historique envers la gestion libre et une volonté étatique d'assurer la solvabilité à long terme des immeubles, notamment pour la constitution des fonds de réserve destinés aux gros travaux.

B. Les normes comptables dans le monde

Aux États-Unis, la méthode de l'Accrual Basis (comptabilité d'engagement) est généralement considérée comme la méthode supérieure, car elle est conforme aux Principes Comptables Généralement Reconnus (GAAP) et fournit la vue la plus complète des obligations financières. Elle est fortement recommandée, voire requise dans les documents de gouvernance pour l'établissement du budget prévisionnel. Une alternative simplifiée, non conforme aux GAAP, est la méthode d'engagement modifié (Modified Accrual Basis), qui enregistre les revenus à l'engagement mais les dépenses uniquement au paiement, un mix entre la comptabilité d'engagement (pour la partie entrées) et la comptabilité de trésorerie (pour la partie sorties).

Dans de nombreux pays européens voisins (Italie, Espagne, Allemagne, Belgique), bien que des obligations de bonne gestion et de reddition de comptes existent (par exemple, le droit de recours contre les décisions de l'administrateur en Italie ), la loi ne semble pas imposer uniformément la comptabilité en partie double et d'engagement avec la même rigueur normative que la France ou l'alignement sur le GAAP américain. Cela signifie que, dans ces juridictions, les associations plus petites ou moins bien gérées peuvent s'en tenir à une comptabilité de caisse (Cash Basis), masquant potentiellement des passifs futurs ou des engagements non provisionnés, ce qui affecte la planification à long terme.

V. La réglementation et la professionnalisation du métier de gestionnaire

Le niveau de réglementation de la profession de gestionnaire immobilier est un indicateur de la protection des consommateurs (copropriétaires) dans chaque juridiction. La France et la Belgique se distinguent par un encadrement professionnel législatif strict.

A. L'Exigence de la Carte Professionnelle en France

En France, l'exercice de l'activité de syndic professionnel est régi par la Loi Hoguet de 1970 et nécessite l'obtention de la carte professionnelle spécifique, dite carte « S ».

Cette carte, délivrée par la Chambre de Commerce et d'Industrie (CCI) , est un sésame indispensable qui garantit le sérieux et la fiabilité du professionnel. Pour l'obtenir, le demandeur doit remplir des conditions strictes concernant : 

  • Les compétences professionnelles (formation post secondaire ou expérience équivalente).

  • L'honorabilité.

  • L'assurance de responsabilité civile professionnelle.

  • L'existence d'une garantie financière.

L'absence de cette carte rend l'activité illégale et expose le professionnel à des sanctions sévères, y compris l'annulation des mandats. 

La Belgique est le seul autre pays d'Europe occidentale mentionné qui légifère également sur l'encadrement professionnel des administrateurs de copropriétés.

B. Absence de réglementation spécifique chez les voisins

Une observation structurante est que, à l'exception de la France et de la Belgique, la profession d'administrateur de copropriété n'est pas spécifiquement réglementée par une licence ou carte professionnelle dédiée en Italie, en Espagne, et en Allemagne. Dans ces pays, la protection des copropriétaires repose moins sur une qualification ex-ante imposée par l'État que sur la possibilité d'un recours ex-post pour faute de gestion ou sur la brièveté du mandat (1 an en Italie et en Espagne) permettant un non-renouvellement rapide en cas d'insatisfaction. La menace de non-renouvellement devient alors un outil principal de discipline du gestionnaire.

C. Fragmentation et qualification en Asie et aux États-Unis

1. Modèles asiatiques

La Chine a mis en place un système de régulation forte pour les professionnels. Le personnel engagé dans la gestion immobilière doit obtenir des certificats de qualification professionnelle conformément aux réglementations nationales. Ceci est une conséquence directe de la réforme du logement urbain ayant transformé le parc public en propriété privée.

Au Japon, un système de licence volontaire pour le gestionnaire de propriété (chintai-kanri-shi) existe depuis 2011. Bien que non obligatoire, elle est recommandée, soulignant une reconnaissance progressive de la nécessité d'une expertise spécialisée.

2. Le cas des États-Unis (HOA)

Aux États-Unis, la réglementation varie considérablement d'un État à l'autre. Une licence de gestion de biens immobiliers peut être exigée, mais il est crucial de distinguer la licence de Property Management (gestion locative) de celle de Community Association Management (gestion de HOA). Les organismes professionnels aux USA militent pour une licence spécifique aux gestionnaires d'association, arguant qu'une licence immobilière générale n'offre pas l'éducation nécessaire pour naviguer dans les complexités de la gouvernance collective des HOA, un argument qui réaffirme l'approche spécialisée adoptée par la France avec la Carte S.

Tableau 2 : Synthèse comparative des réglementations comptables et professionnelles

Critère

France

Italie

Allemagne

Belgique

USA (HOA)

Chine

Japon

Comptabilité Normée

Oui : Partie Double/Engagement (Accrual)

Non clairement spécifiée

Non spécifiée

Non spécifiée

Accrual Basis Recommandé (GAAP) et souvent requis pour le budget

Non spécifiée

Non spécifiée

Période de Conservation Doc.

5, ans, 10 ans et 30 ans

Non spécifiée

Non spécifiée

Non spécifiée

Varie selon les statuts de l'HOA

Non spécifiée

Non spécifiée

Métier Réglementé

Oui : Carte Professionnelle "S" obligatoire

Non : Pas de licence spécifique

Non : Pas de licence spécifique

Oui : Métier légiféré

Variable par État. Distinction nécessaire avec PM Licence

Oui : Qualification Certificate obligatoire

Non : Licence volontaire (chintai-kanri-shi)

Organe de Contrôle


CCI

Marché / Juridictions civiles

Marché / Juridictions civiles

Instance étatique

Organismes étatiques ou sectoriels (selon État)


Organes d'État

Organisme sectoriel (volontaire)

VI. Perspectives transnationales

L'analyse comparative des modalités de gestion des copropriétés autour du globe fait ressortir un spectre d'approches allant de la codification légale rigide à l'autonomie contractuelle des associations ou syndicats de copropriétaires. La législation française, par sa complexité et ses exigences, se positionne comme un modèle de forte intervention étatique visant à structurer et sécuriser la propriété collective.

A. La dialectique de la réglementation professionnelle

L'une des différences fondamentales réside dans l'encadrement du gestionnaire. La France et la Belgique exigent une qualification professionnelle obligatoire (Carte S). Cette approche vise à garantir une compétence et une solvabilité ex-ante, réduisant ainsi les risques de mauvaise gestion et le nombre de contentieux.

En revanche, en Italie et en Espagne, l'absence de licence professionnelle spécifique est compensée par la brièveté des mandats (un an). Cette rotation rapide est un mécanisme de reddition de comptes et de discipline de marché, mais peut potentiellement nuire à la continuité et à la planification des travaux à long terme.

Dans les modèles non européens, la Chine opte pour une réglementation obligatoire des qualifications , signalant une reconnaissance de la complexité de l'activité, tandis que le Japon et les États-Unis présentent des systèmes plus fragmentés ou volontaires, où la qualité de la gestion dépend fortement des statuts internes (HOA Governing Documents) et de l'autorégulation sectorielle.

B. Convergence vers la transparence financière

L'obligation de la comptabilité d'engagement en partie double en France  et la recommandation du standard GAAP (Accrual Basis) aux États-Unis  révèlent une tendance internationale vers des normes de transparence financière plus élevées.

La gestion des copropriétés, impliquant d'importants budgets prévisionnels et la constitution de fonds de réserve pour l'entretien structurel, nécessite l'adoption de méthodes comptables qui suivent les engagements (créances et dettes) plutôt que les seuls flux de trésorerie immédiats. L'imposition d'une comptabilité d'engagement garantit une gestion prédictive essentielle à la pérennité du patrimoine immobilier, une exigence qui, si elle n'est pas explicitement légiférée dans d'autres pays européens voisins, expose potentiellement ces systèmes à des difficultés de financement à long terme.

C. L'Équilibre Subtil des Majorités

La sophistication du système de majorité français (Art. 24, 25, 26) et de ses mécanismes de passerelle (Art. 25-1) démontre un effort législatif pour naviguer entre la protection des droits de propriété minoritaires (notamment avec les majorités absolues et doubles) et l'efficacité de la prise de décision. Cette complexité législative contraste avec les systèmes qui s'appuient davantage sur la simple majorité ou la supermajorité pour des actes spécifiques (USA)  ou qui privilégient un intérêt social impératif (accessibilité en Espagne) même au détriment de la rigidité statutaire.

Pour terminer cet article, le régime français de gestion des copropriétés est défini par une forte normativité descendante, caractérisée par la professionnalisation obligatoire de l'agent exécutif (Carte S), le statut clair de la collectivité (syndicat personne morale), et la standardisation comptable (Partie double/Engagement). Cette approche centralisée cherche à minimiser les risques inhérents à la gestion de la propriété collective, offrant un modèle riche en enseignements pour les juridictions cherchant à améliorer la gouvernance et la transparence dans ce secteur crucial du logement métropolitain.

SOURCE: CABINET OEFE IMMO

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